Celles qui osent a rencontré une « nez », personnage clé de l’industrie du parfum, capable de discerner des centaines d’odeurs différentes ! Céline Thomasson a passé une dizaine d’années derrière un orgue de parfums, avant de fonder sa marque déposée Lueurs et Senteurs, création française et artisanale de bougies parfumées. Maman de deux enfants, seule à la tête de sa micro entreprise située à Bois-d’Arcy, dans les Yvelines, Céline Thomasson a offert à Celles qui Osent un peu de son temps, pour revenir sur son parcours : des odeurs de la Provence aux fragrances de ses propres bougies.
Vacances provençales : la naissance d’une “nez”
Née à Dreux, originaire d’Eure-et-Loir, elle grandit dans la campagne du Centre-Val de Loire : difficile à ses débuts donc de s’acclimater à la vie parisienne ! Sa mère était assistante dentaire, son père d’abord entrepreneur, puis salarié dans le domaine de la métallurgie. A priori, rien ne prédestinait Céline Thomasson à devenir créatrice de bougies.
Pour elle, la cellule familiale est très importante, si bien qu’elle entretient depuis toujours de très bonnes relations avec son grand frère. D’ailleurs, en 2008, le jour de l’an, c’est grâce à lui qu’elle rencontre son amoureux et le papa de ses enfants. Son conjoint baigne dans un tout autre univers olfactif, chez PSA, dans l’industrie automobile.
Céline Thomasson suit une scolarité classique, dans laquelle elle se sent bien plus à l’aise en sciences et en chimie qu’en français ou en histoire géographie.
Sa grand-mère possède une maison dans le sud de la France, dans la très jolie station balnéaire de Sanary-sur-Mer. Tous ses étés, elle les passe sur la Côte d’Azur. C’est là-bas que s’éveille son odorat, son intérêt pour les senteurs, d’olivier, de pin ou de lavande…
Une formation spécialisée en parfumerie à l’ISIPCA
Au lycée, elle s’attèle à chercher une école spécialisée dans le parfum. Elle découvre l’ISIPCA, l’école française d’études supérieures en parfumerie. L’entrée est très sélective. Le processus comprend une étude de dossier scolaire puis un concours avec un examen écrit et un oral devant des professionnels. Céline Thomasson réussit la sélection, et entame donc un cursus avec l’apprentissage de la parfumerie, de la cosmétique et de l’arôme alimentaire. L’enseignement comprend beaucoup de travaux pratiques : elle y développe sa culture olfactive, manipule des matières premières artificielles, des odeurs synthétiques (gazon, banane…) et des essences naturelles (racine, noix de muscade…). Son choix s’opère tout particulièrement vers la création de parfums. Elle réalise son alternance chez Fruitaflor Flavor & Fragrances, pour y concevoir à la fois des parfums et des arômes artificiels . « Le recours à des matières synthétiques a permis d’explorer des senteurs très diversifiées et de reproduire des notes olfactives qu’il est tout simplement impossible d’obtenir de manière naturelle. Il existe un grand nombre de parfums dont les formules sont principalement synthétiques. Chez certaines fleurs comme le muguet, la jacinthe, le magnolia, il est quasiment impossible de l’extraire naturellement, via la distillation. C’est aussi le cas pour les senteurs de certains fruits (l’abricot, le coing, la fraise…), certains bois (le bois de Cachemire) et les senteurs alimentaires (le chocolat, l’amande, le beurre…). Les parfumeurs font alors appel à la chimie et aux molécules pour travailler ces notes. » Elle ne le sait pas encore, mais un jour, elle créera ses propres bougies…
Une passion : composer des parfums
Diplôme en poche, elle poursuit ses études en DEUG de biologie option chimie. Ce cursus plus général est déroutant pour elle « c’est assez difficile de retourner dans un univers très scolaire quand on a goûté à l’alternance et au monde du travail ».
Lassée des études supérieures, elle ne continue pas en master, préférant chercher directement un poste dans la création de parfums.
Elle est très vite recrutée dans une grande multinationale, Drom Fragrance, à Suresnes. Elle y restera onze ans. Céline Thomasson n’est pas totalement « nez ». Elle assiste, travaille en binôme avec des parfumeurs comme Philippe Romano. D’après un brief client, celui-ci réalise la formulation, composée de 20 à 90 matières premières. Elle élabore ensuite manuellement le concentré à l’aide de son orgue de parfumeur, constitué d’une multitude de matières premières « brutes ». Comme dans une partition, elle compose le parfum, avec ses notes de cœur, de tête et de fond. Elle fabrique des échantillons de fragrances diverses : fruitées, musquées, boisées, marine, verte, gourmande… La palette créative est immense ! « Dans le laboratoire, cela sent très fort, mais au fur et à mesure des années, je n’y prête même plus attention. Les odeurs font partie intégrante de mon quotidien. » Onze années à composer des parfums pour le savon, le gel douche, les bougies. Elle a également l’opportunité de réaliser des fragrances exceptionnelles, de niche, de très haut de gamme, à l’aide de matières rares, naturelles et onéreuses. Ces parfums prestigieux originaux, dits « signatures », sont destinés à de grandes maisons telles que Juliette has a gun, l’Artisan Parfumeur ou Francis Kurkdjian.
Ce métier est passionnant, mais il grignote petit à petit sa vie personnelle. Pour se rendre au travail, Céline Thomasson doit passer deux heures et demi par jour dans les transports en commun : son quotidien est trop intense. « Physiquement, je fatigue. » Elle songe alors à prendre son indépendance, entreprendre pour préserver son équilibre familial, personnel et professionnel. « La santé est plus importante que le travail. »
Fabriquer des bougies parfumées de qualité
Transmettre sa passion et son savoir-faire olfactif
Petit à petit, sa reconversion professionnelle mûrit. Céline Thomasson se positionne sur le concurrentiel marché de la bougie. Comme une « madeleine de Proust », ce produit amène des émotions, des souvenirs agréables. « La bougie est un objet décoratif, mais aussi un objet qui se consume pour créer un moment de détente, une ambiance apaisante, un petit bonheur éphémère poétique. » Fabriquer des bougies parfumées, c’est relativement simple en matériel et en investissement. Fort de sa formation et de plus de dix ans d’expérience, elle maîtrise son sujet, et à l’envie de transmettre son savoir-faire. « Travailler dans l’artisanat, c’est valoriser le fait main, l’authenticité ; un retour à l’essentiel que je recherchais et dont j’avais besoin. »
Elle souhaite créer des bougies de qualité et valoriser une manière de consommer différente, plus responsable « je voulais vendre des bougies saines, non polluantes, artisanalement coulée à la main. »
Créer seule son entreprise Lueurs et senteurs
Pendant un an, Céline Thomasson se fait aider par un organisme d’accompagnement à la création d’entreprise. BGE l’épaule dans son business plan et son étude de marché. « On apprend beaucoup de soi-même. J’étais tenté par l’aventure de la nouveauté et de l’entrepreneuriat. J’aurais vraiment regretté de ne pas avoir essayé. ».
Elle construit son site internet, créer son logo, tandis qu’un ami passionné de photographies lui réalise de jolies photos de ces bougies. En juillet 2019, elle immatricule sa microentreprise « Lueurs et senteurs », prénommée lueur comme la bougie et senteur pour évoquer les fragrances. Elle imagine une gamme de bougies issues des sept grandes familles olfactives : les florales, les boisées, les aromatiques, les chyprées, les orientales, les fougères, et les hespéridés, ainsi que toutes leurs facettes (gourmandes, nouvelle fraîcheur, musquée, fruitée, marine…). À terme, elle aimerait créer ses propres parfums.
Consommer responsable, consumer sans danger
Céline Thomasson choisit des matières premières non toxiques pour la santé et l’environnement, sans CMR substances cancérigènes mutagènes ou toxiques et sans phtalate.
Il n’y a évidemment pas de plomb dans les mèches, trop nocif à la combustion. A la place, elle utilise une âme en papier, constituée de papier enduit de cire végétale (conforme aux normes européennes) ou des mèches en bois d’érable. La cire est 100 % soja issu de plantations non-OGM, ne participant pas à la déforestation, entièrement biodégradable, végane et non testée sur les animaux. Le packaging des produits est en carton recyclé, issu du tri sélectif local, et chaque pochon certifié 100 % coton. Une bougie coûte en moyenne 47 euros.
Seule à la tête de sa petite entreprise, Céline Thomasson est touchée par les attentions, les petits mots encourageants des particuliers et professionnels, qui lui donnent raison de continuer. Les derniers mois, liés au Covid19, ont été plus difficiles, mais la vente sur le web a permis de sauver l’activité. Bonne nouvelle, elle vient d’être référencée sur le site de Nocibé, sur la parfumerie française et plusieurs boutiques notamment en Belgique ! Pour vous procurer votre bougie parfumée artisanale, n’hésitez pas à visiter la boutique du site internet de Lueurs et senteurs.
Violaine B – Celles qui Osent
En attendant notre prochain article, n'oubliez pas de suivre notre podcast sur ces Femmes qui Osent